KANAKY 2 KANAK : 30 ANS DÉJÁ
KANAKY 2 KANAK : 30 ANS DÉJÁ
by Henri KALA-LOBÈ
Discussion
basique et classique, dans un rade des Halles, autour d´une roteuse (bière),
entre Kainf-Kainfri–Africains, de la Diaspora sur la démocratie et les Droits
de l´homme (sur une Femme allongé), tant au Lédge (Village), qu´á
Béng´(France). Donc discussion de Diasporiens ne rimant á rien, ne servant á
rien, même pas á étancher une soif tenace.
´Y´avait
là un Greun (Noir=Re-Noi ; Négre= Greun), seul. Un Kanak : Davel. Qui
me fait comprendre que Denis Pourawa est á Paris, pour la grande exposition
Kanaky, au musée du Quai de Branly (ex-Arts Premiers et Primitifs), du 23
Octobre 2013 au 26 Janvier 2014. Bien entendu, je m´y pointe les samedi 26 et
dimanche 27 Janvier 2014…
Il y
avait, á l´entrée de l´expo, trois grandes statues empreintes de rituelles
générationnelles, en bois de l´écorce de l´arbre de la tradition, où coule la
sève de l´intemporalité. On aurait dit de lilliputiennes miniatures des
gigantesques statues de l´île de Pâques, en pierre de grande taille, monolithes
inconnus d´une autre ère. (Botero a forcément dû puiser son inspiration dans
ces deux écoles, Pâques et Kanak).
Il y
avait aussi, au fil de l´expo, ces robes en cotonnade d´ « adieu
foulard/Adieu madras », qui ressemblent tant aux tenues des femmes de
Madagascar, sous le règne des reines Mérina, au XIXème siècle.
Et,
il y eut ce pas de deux, duo de la danse pour la paix, « Trajectoires
K », á l´auditorium, entre deux chorégraphes, nés en Nouvelle Calédonie,
Laetitia Naud et Richard Digoué, sur les événements qui se sont passés là-bas,
il y a trente ans déjà.
Deux des frères de Jean-Marie Tjibaou (leader du Front de Libération National Kanak et Socialiste), assassinés, en décembre 1984. Éloi Machoro, abattu par le GIGN, en janvier 1985. J-M Tjibaou et Yéiwéné Yéiwéné, assassinés par un militant extrémiste du FLNKS mécontent des accords France-Nouvelle Calédonie… Et le massacre carnage de la Grotte d´Ouvéa, avril 1988. Et tant d´autres encore !
Deux des frères de Jean-Marie Tjibaou (leader du Front de Libération National Kanak et Socialiste), assassinés, en décembre 1984. Éloi Machoro, abattu par le GIGN, en janvier 1985. J-M Tjibaou et Yéiwéné Yéiwéné, assassinés par un militant extrémiste du FLNKS mécontent des accords France-Nouvelle Calédonie… Et le massacre carnage de la Grotte d´Ouvéa, avril 1988. Et tant d´autres encore !
Laetitia
Naud, face au public, raconte. « En 1985, j´ai dansé « la mort du
Cygne », dans mon village, Pwêêdi-Wiimiâ, situé dans la Province Nord,
devant deux communautés en guerre… ». En fait, l´une des deux communautés
était venue pour exterminer l´autre…
« J´avais á peine 15 ans… ». Aujourd´hui, « je rêve que le pardon que nous faisons sur scène, soit un jour fait par l´ État français á la hauteur du monde kanak. ».
« J´avais á peine 15 ans… ». Aujourd´hui, « je rêve que le pardon que nous faisons sur scène, soit un jour fait par l´ État français á la hauteur du monde kanak. ».
2001,
Laetitia Naud est á Saint-Étienne, quand elle apprend qu´une compagnie de danse
contemporaine kanaky, la Cie Nyian, est
au festival d´Avignon. Ce sera ses premières retrouvailles hexagonales
avec Richard Digoué, fondateur de ladite compagnie, qu´elle retrouvera, en
2005, en Nouvelle Calédonie. Nait l´idée de cette chorégraphie, en duo. Comme
la concrétisation d´un rêve d´enfants, âgés de 6 et 7 ans, émerveillés par le
grandiose spectacle du Festival
Mélanésie 2000, en 1975, á Nouméa.
Face
au public, Richard Digoué refuse poliment de parler, nous gratifiant dun
immense smile. Finalement, Denis Pourawa, poète et voix off du spectacle, prend
la parole.
« La
douleur est toujours là. C´est toujours très difficile, pour nous, de parler de
ce qui s´est passé. ». Et la rencontre scénique, entre Calédoniens et
Kanaks, est toujours difficile, poursuit-il.
Denis Pourawa avait auparavant travaillé, au Pays, avec Jean Boissery, un metteur en scène Caldoche (Béké, au Antilles ; Toubab, au Sénégal =Blanc), sur l´ « Œdipe », de Sénèque, « et le mal être de l´individu et de la société caldo-kanak ».
Il s´agit de partage entre Kanaks et « Calédoniens, nés au Pays, qui respirent notre terre, et connaissent nos secrets et mystères. ». Denis Pourawa évoque ensuite le père de Laetitia Naud, enseignant incarcéré, en Nouvelle Calédonie. Il évoque aussi l´assassinat de Pierre Declerc (autre Caldoche), dont la femme et la fille étaient présentes dans la salle. « Cet assassinat fut vraiment le déclic des événements de 1984. C´était en 1981. Jusqu´en 1984, j´avais 8 ans, á Kanala, la tension ne cessera de peser sur les populations, avec les touts premiers barrages politiques. Pierre Declerc était l´ami d´Éloi Machoro. ».
Denis Pourawa avait auparavant travaillé, au Pays, avec Jean Boissery, un metteur en scène Caldoche (Béké, au Antilles ; Toubab, au Sénégal =Blanc), sur l´ « Œdipe », de Sénèque, « et le mal être de l´individu et de la société caldo-kanak ».
Il s´agit de partage entre Kanaks et « Calédoniens, nés au Pays, qui respirent notre terre, et connaissent nos secrets et mystères. ». Denis Pourawa évoque ensuite le père de Laetitia Naud, enseignant incarcéré, en Nouvelle Calédonie. Il évoque aussi l´assassinat de Pierre Declerc (autre Caldoche), dont la femme et la fille étaient présentes dans la salle. « Cet assassinat fut vraiment le déclic des événements de 1984. C´était en 1981. Jusqu´en 1984, j´avais 8 ans, á Kanala, la tension ne cessera de peser sur les populations, avec les touts premiers barrages politiques. Pierre Declerc était l´ami d´Éloi Machoro. ».
Silence…
L´émotion est perceptible dans l´assistance.
« Jusqu´aujourd´hui,
je n´arrivais pas á écrire sur cette période, top brûlante encore dans mon cœur
et dans mon esprit. ».
Laetitia
le conforte : « Il fallait pouvoir verbaliser cette période.
Enlever la censure pour parler de ce vécu, de ces événements. Créer une
passerelle générationnelle. ».
Elle
revient sur le spectacle : « Après la tournée, en Nouvelle
Calédonie, nous nous retrouvons au Quai de Branly, pour la première scène
parisienne de Denis ; c´était comme une mini résidence pour lui. ».
Le père
de Laetitia était un agriculteur nantais, parti en 1962, comme coopérant
(Volontaire pour le Service Militaire), pour être instit´ des écoles catholiques,
en Nouvelle Calédonie. Où Laetitia est née, á Thio très exactement, de mère
Calédonienne. « Il y avait un réel apartheid, en Nouvelle
Calédonie », se souvenant de cette anecdote que lui racontait son père
blanc, parti se baigné avec des locaux, noirs : « Vous allez salir
l´eau pour mon bétail ! », lui jette un Caldoche mal embouché du
coin… Colonisation, acculturation, dépossession foncière, déplacements des
populations kanay et contrôle des déplacements des Kanak…
Son
papa sera emprisonné 6 mois, « pour s´être juste engagé pour la dignité de
l´être humain. Quel qu´il soit. ». Il sera amnistié. Donc, « il n´a
pas pu, sur un plan purement juridictionnel, dénoncer le pourquoi de son
incarcération arbitraire ».
Ce
sera une prof ´de latin, de passage, qui lui intimera de monter sur Paris
continuer la danse, après sa performance dans « La mort du Cygne ».
Ils
sons tous là, assis au bord de la scène, comme assis sur les rivages de la
plage de l´humanité. Les voix sont douces et posées, apaisées et apaisantes,
nous embarquant dans le sillage nourrissant des îles perdues du bout du bout de
l´Océan Pacifique, îles éperdues d´immensités nostalgiques. Comme si la France
était devenue une île que bordent Océan Atlantique et mer Méditerranée et la
Manche.
Ce
précieux paisible caillou du Pacifique, apporta la dernière guerre
d´Indépendance, en Francophonie.
Ce qui allait susciter des vocations indépendantistes aux Antilles (Action Révolutionnaire Caraïbes, Mouvement Indépendantistes Martinique).
Ce qui allait déboucher sur la « revalorisation » des départements d´outre-mer (DOM), en régions (d´outre mer), et de territoires d´outre mer (TOM), en pays disposant d´un gouvernement. La Nouvelle Calédonie doit accéder á l´Indépendance, par référendum, en cette année 2014, du Centenaire de la 1éreGM.
Ce qui allait susciter des vocations indépendantistes aux Antilles (Action Révolutionnaire Caraïbes, Mouvement Indépendantistes Martinique).
Ce qui allait déboucher sur la « revalorisation » des départements d´outre-mer (DOM), en régions (d´outre mer), et de territoires d´outre mer (TOM), en pays disposant d´un gouvernement. La Nouvelle Calédonie doit accéder á l´Indépendance, par référendum, en cette année 2014, du Centenaire de la 1éreGM.
Ces
événements seront aussi le dernier soulèvement d´un Peuple Noir contre l´
Apartheid du développement séparé de la Grande Bretagne, et/ou du Statut de
l´Indigénat de la France qui sévissait encore jusqu´en 1958, en Afrique Noire
Francophone…
C´était
il y a 30 ans déjà. Après Soweto, des 70´s, en Afrique du Sud, le mouvement
kanaky sera la dernière escarmouche anti-apartheid et statut de l´indigénat á
faire mouche !
Et
puis, cette exposition de la « Kanakie » libre, au Musée du Quai de
Branly, ne peut faire oublier ce Musée des Arts Africains et Océaniens, á la
Porte Dorée, débaptisé en Musée de l´Immigration… déplacé en Musée des Arts
Premiers et Primitifs, finalement devenu musée du Quai de Branly… pourquoi
faire simple, quand on peut tout compliquer ! L´Afrique et l´Océanie
allait de pair, á l´époque. De Canaque á Kanak. De Cameroun á Kamerun. Comme si
ce «C» était trop caucasien pour un «K» révolutionnaire et contestataire !
Le
tout en musique et dans la bonne humeur. Je me souviens de ma première
rencontre avec la musique Kanaky. Cela ressemblait
tellement á du makossa (musique du Cameroun), que je me suis mis á danser ! Étonnés, d´aucuns Kanak de me demander où donc avais-je appris á danser sur leur musique (et la musique malgache ressemble au bikutsi -autre musique camerounaise-).
tellement á du makossa (musique du Cameroun), que je me suis mis á danser ! Étonnés, d´aucuns Kanak de me demander où donc avais-je appris á danser sur leur musique (et la musique malgache ressemble au bikutsi -autre musique camerounaise-).
Il y
eut aussi cette folle nuit, après la fermeture du musée. Une trentaine de Kanak,
sur les trottoirs de la rue de l´Université, apportant une pacifique chaleur
humaine pour égayer la grisaille hivernale ambiante, jusqu´á 4 heures du mat´,
avec les riverains applaudissant, au balcon, cette improvisation de bienvenue.
Sacré Funky Kanak va !
Crédit photos: Romain ÉTIENNE/Item